Project Detail: Teufelsberg

Contest:

LuganoPhotoDays 2016



Brand:

LuganoPhotoDays



Author:

Marie Sommer

 

Project Info

Teufelsberg

Marie Sommer, née en 1984, a étudié à l’École Nationale des Arts Décoratifs de Paris en Image Imprimée puis à l’École de la Photographie d’Arles. A la même période elle commence à publier des livres avec les Éditions Filigranes et l’auteur Jean-Yves Jouannais. Elle a participé à différentes résidences en Espagne, en France et au Japon: Bilbao Arte, Casa de Velazquez, Matadero Madrid, Montevideo Marseille, et Kyoto Art Center. Son travail à été exposé dans différentes institutions et lieux d’art comme Le BAL Paris, les Rencontres d’Arles, PhotoIrland Festival à Dublin, PHotoEspaña et les Transphotographiques de Lille. Sa pratique est à la croisée de différents médiums qu’elle met en scène dans des installations : vidéo, photographie, images d’archives, livres et objets.

Mon travail explore les possibilités d’un lieu ou d’un espace et ses capacités de stratifications historiques. Il s’agit de rendre compte du temps et des recouvrements qu’il génère, des réalités cachées ou inattendues. Ces projets, ni totalement documentaires, ni de fiction, sont des projections sur le réel. J’utilise l’image d’archive, l’objet et le livre comme des éléments préexistants à ma rencontre, qui donneront une autre dimension temporelle à la pièce et permettent de passer à un espace sculptural. Mon intention est de révéler ou de laisser caché ce qui peut être vu, et, par cette pratique, construire une recherche autour du pouvoir de révélation et de survivance qu’incarne certaines images

Teufelsberg (La montagne du Diable)

La première fois que je me suis rendue sur la colline de Teufelsberg, j’y ai seulement vu un espace consacré
aux loisirs.

Située au sud-ouest de Berlin, cette colline domine la ville et marque la frontière entre la fin de la ville
et le début de la grande forêt de Grünewald ; les gens viennent s’y promener, admirer le panorama. Seul point culminant de la capitale, on y vient pour jouer au cerf-volant, pratiquer le parapente ou le VTT. Dans les années 60, on y trouvait aussi une petite station de ski.

Plus tard j’ai appris que cette colline était artificielle. Elle a été érigée avec les décombres de la ville
bombardée lors de la Seconde Guerre mondiale afin d’ensevelir un des bunkers construits par Albert Speer.
Ce bunker devait abriter une faculté militaire qui n’aura jamais vu le jour. Après la guerre, le bunker, difficile
à détruire, a été recouvert des 30 000 000 de mètres cubes de gravats provenant des bombardements de Berlin. Aujourd’hui il est encore possible de voir des morceaux de tuile ou de brique affleurer le sol.

Plus tard encore, j’ai visité à son sommet un centre désaffecté d’espionnage américain de la NSA. Depuis
la fin de la guerre froide il n’a toujours pas été détruit et ses grandes sphères blanches dominent la colline
et la ville.

Aucune pancarte, aucun panneau n’explique ni les origines de Teufelsberg ni le fonctionnement du centre d’espionnage. C’est un non-lieu où se mélangent les loisirs actuels et les ruines du passé.

Les photographies retracent ici les différents parcours que j’ai effectués sur « la montagne du Diable ». Je tente de restituer par ces images ce fort sentiment d’amnésie qui émane de la colline, et qui m’a frappé dès la première visite. Une sensation de mémoire cachée, de dissimulation de l’histoire…

Parallèlement à mon travail photographique, j’ai collecté des documents d’archives sur l’histoire de cette colline (photographies, articles de journaux...) conservés au Centre des archives de la Ville de Berlin.
Ces documents montrent la construction de Teufelsberg, l’ensevelissement de l’université militaire en 1949, la fermeture du centre de radars américains en 1993 et nous éclairent sur l’implication des Berlinois dans ce projet de construction.

Marie Sommer

Photos